Question :
Que doit faire la femme qui a vu ses règles apparaitre avant d’effectuer les circumambulations (tawâf) de l’ifâda et dont le groupe accompagnateur a refusé de l’attendre ?
Réponse :
Certains érudits estiment que la femme qui a ses menstrues doit patienter jusqu’à ce qu’elle ait recouvert son état de pureté rituelle majeure car son tawâf ne peut aucunement être valable en pareille circonstance. Tel est l’avis adopté par l’imam Mâlik et Ach-Châfi’î ainsi qu’une opinion attribuée à l’imam Ahmed, tous deux considèrent les menstrues incompatible avec le tawâf tout comme elles sont incompatibles avec la prière. En effet, le Prophète (salla Allahu ‘aleyhi wa sallam) a dit à ‘Aicha [alors qu’elle était dans sa période de menstrues] : « Fais tout ce que les autres pèlerins font, mis à part le tawâf jusqu’à ce que tu sois purifiée ». Ce récit est rapporté par Al Bukhârî (305) et Muslim (1211) par l’intermédiaire de ‘Abdel’azîz Ibn Salama Al Mâjichûn selon ‘Abderrahmân Ibn al Qâsim qui le tient de son père d’après ‘Aicha.
D’autres érudits soutiennent que la pureté rituelle est une obligation mais n’en font pas une condition de validité du tawâf, c'est-à-dire que le tawâf de la femme indisposée est valide, néanmoins elle est redevable d’une offrande compensatoire. Tel est l’avis adopté par Abû Hanîfa et l’un des avis attribué à l’imam Ahmed.
Un troisième groupe d’érudits considère que même si le fait d’être en état de pureté rituelle mineure constitue seulement une sunna , ils estiment toutefois que le fait d’être purifié des menstrues et de la janâba (impureté majeure qui résulte de l’acte sexuel) demeure une condition indispensable à la validité des circumambulations rituelles (tawâf) aussi longtemps que la personne est dans capacité de l’être .
Si donc la femme indisposée ne peut pas rester [à la Mecque] jusqu’à ce qu’elle ait recouvert sa pureté et qu’il lui est impossible de revenir plus tard, alors nul grief contre elle. Elle devra mettre un tissu de protection (sur ses parties intimes) ou prendre toute autre disposition similaire puis accomplir le tawâf autour de la Demeure sacrée sans être tenue de la moindre compensation.
En effet, Allah a évité épargné la gêne aux membres de cette communauté. Le Très Haut a dit : {Il ne vous a imposé aucune gêne dans la religion} [1]. Ce verset est venu écarter sorte de difficulté. Le nom « gêne » dans le contexte de ce verset a été employé sous sa formé indéterminé assorti d’une négation et précédé par l’article « min », ce qui confère une portée générale à la nécessité d’alléger tout ce qui contient une gêne pour l’être humain.
Allah le Très Haut a dit : {Allah n'impose à aucune âme une charge supérieure à sa capacité} [3] et le Prophète (salla Allahu ‘aleyhi wa sallam) a dit : « Si je vous ordonne quelque chose, accomplissez-en ce dont vous êtes capables ». Ce récit est rapporté par Al Bukhârî (7288) et Muslim (1337) par l’intermédiaire de Ar-Rabî’ Ibn Muslim selon Muhammed Ibn Ziyâd qui le tient d’Abû Hurayra (qu’Allah l’agrée).
Quiconque sait apprécier les subtilités de la Chari’a et de ses statuts légaux, et quiconque parvient à cerner l’objectif global de la Loi Divine, sera en harmonie avec cet avis.
Ainsi, il n’est pas possible de donner un avis consultatif à cette femme la contraignant à rester à la Mecque sans accompagnateur légal (mahram) car cela serait la source d’un grand mal.
De même qu’il n’est pas possible de délivrer un avis consultatif l’invitant à revenir à la Mecque [pour pouvoir effectuer le tawâf une fois purifiée] alors qu’elle n’en a pas la possibilité. Car cela impliquerait pour elle de devoir rester en état de sacralisation sans possibilité d’entretenir des rapports avec son époux ni d’enfanter jusqu’à ce qu’elle ait accompli les circumambulation ou qu’elle meure dans cet état. Il va sans dire qu’une telle situation est contraire à l’esprit de Chari’a et au bon sens.
Par ailleurs, l’imam Ahmed (qu’Allah lui fasse miséricorde) a dit : « Si l’homme est en état d’impureté majeure (janâba) et qu’il accomplit les circumambulations par oubli, son tawâf est valide et il n’est pas redevable d’aucune offrande compensatoire ». Dans une autre version qui lui est attribuée, il aurait soutenu qu’un tel homme est redevable d’une expiation. De ce fait, la femme indisposée est plus excusable que l’homme en état d’impureté majeure qui accomplit le tawâf par oubli. Tel est le choix pour lequel Ibn Taymiya (qu’Allah lui fasse miséricorde) a opté [4] et a notamment rédigé un texte à ce sujet. Ibn Al Qayyim soutient également cet avis dans son œuvre « I’lâm al Muwaqqi’în » [3/25-41].
Et Allah demeure le Plus Savant.
Cheikh Sulaymân Ibn Nâsir Al ‘Ulwân
Source : « Compilation des fatâwâ de cheikh Al ‘Ulwân sur le hajj», p.13.
Traduction : umhamza
Relecture et correction : Oum-Ishâq
[1]NDT : Sourate Al Hajj ; verset 78
[2] NDT : Il existe une règle dans la science des usûl qui dit : « An-Nakira fi siyâq an-Nafî tufîd al ’umûm » : le nom indéterminé précédé d’une négation indique la généralisation
[3]NDT : Sourate Al Baqara verset 286
[4] NDT : Cheikh Ibn Taymiyya a dit : « Une femme en période de menstrues doit accomplir les rites du hajj qu’elle est capable de faire. Ce sur quoi elle n’a aucun contrôle est pardonné. Elle peut donc accomplir le tawâf (même si elle est en période de menstrues). Elle devra se purifier comme elle se purifie pour entrer en état de sacralisation (ihrâm), et elle devra prendre toutes les dispositions nécessaires comme elle le ferait en état d’Istihâda (métrorragie), cette situation étant plus louable. »